Le learning fait incontestablement partie des domaines RH dans lesquels l’innovation est la plus féconde. Nouveaux dispositifs pédagogiques (à l’image du micro-learning), nouvelles compétences à acquérir, nouvelles possibilités offertes par des technologies de plus en plus sophistiquées expliquent en partie pourquoi la formation en entreprise semble en constant chambardement. Nous avons rencontré Thierry Bonetto, directeur L&D de Danone pendant plus de dix ans et aujourd'hui consultant, pour identifier les principales tendances qui seront à l’œuvre en 2023.
C’est une première tendance très forte : le learning se veut de plus en plus informel. Pour se former, on peut ajouter de la formation au travail. On s’arrête de travailler pour partir en formation. On peut également intégrer de la formation au travail (micro learning, tutos…). Il est posible aussi d'extraire la formation du travail via des retours d’expérience ou du partage entre pairs, avec son manager ou au sein de son équipe. Dans ce dernier cas, le learning se construit à partir du travail. On prend du recul via des moments de réflexivité individuels ou, surtout, en groupe, sur la manière dont le travail est exécuté.
Ce passage du formel à l’informel s’illustre également à travers l’apprentissage en continu. Ce qui suppose de travailler l’expérience d’apprentissage tout au long du « cycle de vie » du collaborateur, sans se cantonner aux seuls temps de formation. Charge aux learning managers d’être les architectes de cette fameuse expérience learning tous les jours, toute l’année. Ce qui suppose, notamment, de placer les outils de formation au bon endroit, c’est-à-dire là où les collaborateurs se rendent : sur le workflow donc, et pas sur le LMS !
Par ailleurs, il semble aujourd’hui nécessaire de proposer des formations qui « parlent » aux individus. Il en va de l’avènement d’un apprenant responsable, qui comprend le sens des contenus qui lui sont livrés et qui va, de fait, se les approprier beaucoup mieux. C’est ce que faisait Danone en donnant un sens global au plan de formation, en tenant évidemment compte des besoins de l’entreprise, mais aussi en faisant en sorte que les individus y trouvent tous un intérêt pour leur employabilité et leur développement.
L’apprentissage dit social constitue une autre tendance forte. On sait que l’on apprend bien avec ses pairs… et lorsque le formateur est un pair. Chez Google par exemple, tous les collaborateurs sont formés pour transmettre efficacement leurs compétences à leurs collègues. Cette initiative représente 70% du plan de formation de la firme de Richmond. Pour sa part, Thales a mis au point des technologies simples permettant la formalisation des savoirs et des savoir-faire. Autre exemple, DBS. Cette banque indonésienne a créé l’initiative Gandalf, une bourse de 1 000 dollars singapouriens. Elle permet à tous les collaborateurs qui le souhaitent de suivre une formation bancaire de leur choix à l’extérieur. Ceci sous réserve qu’ils retransmettent en interne ce qu’ils ont appris à au moins dix personnes.
La personnalisation des parcours se révèle de plus en plus indispensable. Danone encore a mis en place des learning maps par compétences métier pour aider les individus à s’y retrouver. En fonction de leur ancienneté, de leurs compétences, ils pouvaient rapidement visualiser les programmes à suivre. L’Oréal, IBM, Schneider Electric… sont en mesure de proposer les « bonnes » formations en fonction d’une foule de données. Place dans l’organisation, âge, ancienneté, expériences, intérêts personnels, cours déjà suivis… Le profiling a donc d’ores et déjà largement investi la formation, au bénéfice d’une plus grande customization.
Et le digital ? Quelle doit être sa place ? En regard, quelle place (restante !) pour le présentiel ? De toute évidence, la dimension digitale de la formation s’est encore accrue à la faveur de la pandémie. L’offre proposée par les startups et les grands acteurs du marché est d’ailleurs quasi-exclusivement tournée autour du digital… Et, évidemment, le métavers est une tendance à explorer.
On parle depuis plusieurs années d’un learning expérientiel. L’expérientiel n’empêche pas de travailler sur de « vrais » sujets – il n’est pas uniquement dédié à l’exploration ! Et l’échange doit systématiquement accompagner le learning expérientiel afin d’apprendre à partir de… ce que les autres ont appris.
La question du ROI ou du ROE de la formation demeure toujours pertinente. Mais au-delà de leur efficacité, il faut aussi se demander si les formations servent les grandsenjeux stratégiques de l’entreprise. On doit vérifier qu'elle améliore le ROI global et si elle permet de répondre plus rapidement aux besoins. Il faut aussi être en capacité d’évaluer la contribution des actions de formation à la culture learning de l’organisation. On voit là toute l’importance que les données ont prise dans le learning aujourd’hui ; on voit aussi combien les managers ont un rôle évident dans la réalisation du plan de formation : lorsqu’un manager n’envoie pas ses collaborateurs en formation, cela se voit directement !
Enfin, ce que l’on peut qualifier d’écolearning mérite d’être mentionné : onnaissance des enjeux RSE, sobriété et acces- sibilité numériques, réutilisation de contenus existants… Ce sont autant de signaux faibles qui questionnent directement la manière dont la formation est construite et organisée.
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