Jean Jouzel est pragmatique et concret : la transition que l’on va vivre est inéluctable. "Les jeunes ne peuvent pas accepter de vivre avec + 5 degrés en 2050" estime-t-il. Lors de l’interview qu’il nous a accordé, le climatologue a voulu se centrer sur la question du réchauffement climatique qui, à lui seul, irrigue tous les autres problèmes environnementaux. L’attention portée à cet enjeu vital nous permet de mieux anticiper les années à venir.
Le précédent rapport du GIEC a été traduit en moins de trois ans dans les politiques des 80 plus grands états de la planète. Les objectifs de décarbonation fixés pour 2050 sont à la hauteur des défis engendrés par le réchauffement climatique. Cela traduit une réelle prise en compte des travaux du GIEC et de l’urgence qu'il y a à agir. Chez les décideurs politiques et économiques, et, bien sûr, chez les citoyens. Cette prise de conscience doit nous aider à travailler dans la confiance estime le paléoclimatologue. « Aujourd’hui, j’ai envie d’accorder un certain crédit à la parole des décideurs et d’y croire, même si jusqu’ici cela n’a pas été suivi d’effets ».
Cette confiance, engendrée par l’action des principaux pays concernés, est effectivement récente. Les vingt dernières années ont démontré l’existence d’un fossé entre, d’un côté, la communauté scientifique et le GIEC qui avaient bien anticipé le réchauffement climatique et défini les mesures nécessaires à sa limitation à +1,5/2 degrés. Et, de l’autre, les décideurs qui n’ont pas pris au sérieux les appels des scientifiques, persuadés que le business as usual aurait toujours sa place.
Ainsi, les vingt dernières années apportent un bilan contrasté, parsemé de quelques réussites et de nombreux échecs. Nous pouvons nous réjouir que les différents accords mondiaux sur le réchauffement climatique (Protocole de Kyoto en 1997, l’accord de Copenhague en 2009 et les accords de Paris en 2015) se soient appuyés sur les travaux du GIEC. Malheureusement, les prévisions des années 1990 du GIEC se sont vérifiées et n’ont pas du tout été corrigées par des actions volontaristes de la part des États et des acteurs de la vie économique. « Les émissions sont passés de 27 milliards de tonnes équivalents CO2 à 57 milliards en 2019 ».
Cet échec s’explique tout d’abord par l’élection de George Bush Jr qui a décidé le repli des politiques en faveur du climat aux États-Unis et, par ricochets, dans de nombreux pays. « Ce non-engagement des États-Unis a entraîné beaucoup d’autres pays à ne rien faire ». Il s’explique également par l’émergence de la Chine en tant qu'acteur économique de premier plan, ce que personne n’avait anticipé. « Là, il y a vraiment eu un manque de prospective, car les émissions de la Chine ont quasiment triplé entre 2000 et 2010 ».
Si les positions évoluent sensiblement, c'est parce que le réchauffement climatique devient perceptible. Chacun commence à en sentir les effets. « Pourtant, je dis régulièrement que ce que l’on vit aujourd’hui était déjà décrit dans le premier rapport du GIEC » regrette Jean Jouzel.
Le fossé entre les engagements politiques et la réalité risque de s'accroître dans les années à venir. Avec la Stratégie Nationale Bas-Carbone, la France a inscrit dans la loi des objectifs ambitieux. Malheureusement, les moyens permettant d'atteindre ces objectifs ne figurent pas dans le texte de loi. Il va falloir les trouver.
De nombreux secteurs d’activité se sentent aujourd’hui très concernés par le réchauffement. Les travaux de recherche du GIEC par secteurs d’activité, couplés à la sobriété et à l’innovation technologique vont jouer des rôles essentiels.
Atteindre ces objectifs, « c’est aller vers un nouveau fonctionnement de la société » estime Jean Jouzel. Se nourrir, se loger, se déplacer, produire, travailler… Il est essentiel d’anticiper collectivement et rapidement. Cette capacité à anticiper le monde de demain repose sur différents critères. Capacités financières, capacités d’innovation (notamment dans le stockage d’énergies). Mais aussi capacités d’évaluation de ces innovations quant à leur impact réel sur les objectifs de décarbonation. Nous devrons aussi trouver les capacités à nous tourner vers plus de frugalité.Il faudra également produire des visions positives de l’avenir décarboné. Enfin, nous devrons préparer le monde de demain avec des jeunes formés aux transitions.
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