La place que doivent occuper les hommes dans les politiques d'égalité professionnelle reste souvent un impensé dans les entreprises. L'égalité professionnelle est en effet souvent présentée comme un sujet ayant trait aux femmes. Et il n’est pas aisé pour les hommes de se regarder dans le miroir de l’(in)égalité...
Haude Rivoal a récemment animé un groupe de travail à l'Anvie sur cette question. Sociologue, associée au CNAM-CEET et au CRESPPA, auteure de La fabrique des masculinités au travail (La Dispute, 2021), elle estime que mieux associer les hommes à cet immense chantier suppose une compréhension fine des ressorts de la masculinité et de la virilité au travail.
La virilité est un idéal de performance – économique, sociale, sexuelle… –, d’autorité, de dépassement de soi, d’aptitude au combat et à la violence. De ce point de vue, rien n’interdit de penser que les femmes peuvent être viriles. Plusieurs enquêtes montrent d’ailleurs qu’elles sont qualifiées de viriles quand elles investissent des tâches physiques, parlent ou rient fort, sont dans la violence verbale ou font des blagues à caractère sexuel.
La masculinité, en revanche, caractérise des comportements corporels et des manières de parler. Contrairement à la virilité, elle se décline au pluriel : de fait, il existe plusieurs manières d’être un homme, certaines n’étant pas viriles. Elle peut aussi se définir en “négatif”, comme ce que n’est pas la féminité : l’une ne peut pas être pensée sans l’autre. À cet égard, il est intéressant de constater qu’il n’existe pas de pendant féminin à la virilité.
Le concept de masculinité est mouvant en fonction des époques et des cultures. Et pour cause, la masculinité est avant tout une construction sociale. Ainsi, la masculinité valorisée, « hégémonique » n’est pas la même dans le Comex d’une entreprise que dans le vestiaire d’un stade.
Souvent encore, les séminaires d’entreprise sont envisagés comme un vecteur de transmission de codes virils, comme le courage et l’abnégation des entrepreneurs pionniers.
Plus globalement, certaines pratiques d’entreprise favorisent les hommes. Une récente enquête, conduite dans la haute administration, montre ainsi que la majorité des dirigeants sont encore des hommes dans la mesure où :
Un processus dit de sélection/détection favorise des carrières au masculin, et la formation de « boys clubs ».
Lorsque l’on aborde la question des résistances à l’égalité dans le monde du travail, on pointe souvent des comportements individuels problématiques, comme la « masculinité toxique ». Pourtant, dans la plupart des cas, non seulement ces comportements sont connus et bénéficient d’un silence complice, mais ils sont permis par l’environnement de travail. Aussi importe-t-il de s’interroger sur les conditions de travail qui permettent des inégalités, voire des violences.
« Niquer un concurrent », « attaquer de nouveaux marchés », « élaborer un plan d’attaque », « former ses équipes comme des machines de guerre »… Il faut aussi de s’intéresser au vocabulaire employé. En l’occurrence, dans les pratiques managériales, la rhétorique est souvent empruntée au champ militaire ou sportif pour véhiculer des valeurs viriles.
De nombreux hommes sont très sincères dans leur volonté de s’engager pour l’égalité professionnelle. Mais, par une méconnaissance des comportements sexistes, ils peuvent adopter un comportement problématique sans le vouloir – en ne réagissant pas à une blague sexiste pour ne pas créer de conflit, par exemple.
Taper du poing sur la table peut également s’avérer problématique et viril, même si celui qui le fait ne l’envisage pas comme tel. Ce geste sera d’ailleurs perçu différemment s’il est effectué par un homme ou par une femme. Ce phénomène de double standard existe encore pour bien des comportements...
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